Le voyage de Louxor à Assouan, une fois passé le périple en train depuis Le Caire, doit se faire différemment selon que le voyageur est Égyptien, ressortissant d'un pays arabe, ou simple étranger... A chacun une Egypte donc, mais celle des touristes européens ne donne pas vraiment envie.
Chaque jour, parqués dans leurs bus bien frais, des convois remplis d'occidentaux à peine vêtus et rosis par le soleil sont promenés d'un temple à l'autre, d'un faux souk à un restaurant traditionnel (mais climatisé), sous la protection de l'omniprésente Police du Tourisme. Ils rentreront chez eux les yeux pleins d'étoiles pharaoniques mais auront contribué pour la plupart à éduquer toute une population à l'idée que le touriste occidental est une chose fragile protégée partout et peut donc être considéré comme un portefeuille ambulant.
Le plus dommage, c'est qu'au détour d'un chemin de campagne, loin des autoroutes rutilantes construites par le régime, l'acceuil est d'une simplicité et d'une gentillesse déroutante. Pas question donc de nous plier aux règles du tourisme de masse.
Partis de Louxor à l'aube, nous commencons par traverser un souk populaire où des gamins dépècent des carcasses au milieu des poubelles et du trafic. Un peu perdus, nous rencontrons deux ingénieurs cairotes qui nous invitent et nous emmènent en taxi collectif à la recherche d'un minibus de travailleurs en partance pour la ville d'Edfu (et de son temple pas loin) puis de Kom Ombo.
Au premier contrôle de police, Raphaël explique dans un arabe presque parfait et sans accent que nous sommes des français aux racines algériennes qui apprennent l'arabe au consulat français du Caire tandis que j'acquiesce dans un arabe balbutiant. Cette histoire savamment élaborée nous permet de voyager aux mêmes conditions que les locaux, puisque nous sommes supposés être arabes. Un peu de barbe, et mes cheveux bouclés achèvent d'ouvrir les multiples barrages sur la route. A l'un d'eux, le flic se fend d'un sourire affable, à la grande surprise des autres voyageurs du minibus, et nous déclare sans plus de chichis: "Bienvenue dans ta deuxième patrie, l'Egypte! Le peuple arabe est uni".
A vélo, en rickshaw, en minibus et parfois à pied, nous avons donc peu à peu descendu le Nil jusqu'à la Nubie, en ne croisant que quelques occidentaux dans des temples souvent déserts (chaleur oblige), fraternisant un peu avec les flics (il faut), souvent aidés par une population très accueillante, trop heureuse de trouver des touristes arabisant (je m'adapte), respectueux des normes vestimentaires (je mets des foulards), et intéressés aussi par d'autre choses que des fresques antiques (très impressionnantes).
Avec notre budget temple bien réduit puisque l'Egypte favorise les ressortissant arabes en cassant les prix des entrées, notre budget voyage quasi-nul puisqu'adapté au salaire local, nous sautons dans un train première classe pour rentrer au Caire en 14h de trajet. Cette fois c'est un train presque moderne, plus de poules, de chèvres et de jeux de tetris permettant aux femmes du wagon de ne pas avoir à côtoyer un homme inconnu... On s'endort tout seuls dans un wagon vide...
2 commentaires:
super super super
je te lis de Berlin et je savoure. Tu m'expliques l'allusion au Tétris.
La bise au barbu Raph.
Greaat share
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